Peu de gens le savent, mais j’ai commencé ma carrière dans l’enseignement en devenant formatrice professionnelle en anglais. A mon retour des États-Unis, et en attendant d’obtenir la confirmation que j’étais bien inscrite en thèse de doctorat, j’avais mis une petite annonce sur Le bon coin pour donner des cours particuliers en anglais. C’est grâce à cette petite annonce que j’avais été repérée par le gérant d’un centre de formation, qui m’a alors proposé de donner des cours pour son organisme.

A l’époque, j’étais encore très (trop) naïve vis-à-vis du monde professionnel en général, et du monde de la formation professionnelle en particulier. J’ai donc fait toutes les erreurs typiques du débutant. Je n’ai pas signé de contrat avant de commencer à travailler, car l’homme était pressé et souhaitait que je débute immédiatement (contrat qui aurait dû m’être serait envoyé après avoir commencé certaines missions, mais dont je ne verrai jamais la couleur). Je n’avais pas fait de recherche sur les salaires ou sur le marché de la formation pro, et n’avais donc pas négocié ma rémunération (scandaleusement basse). Je ne m’étais pas renseignée non plus sur la réputation de l’établissement de formation ou du gérant, ni sur les différentes démarches qualités que celui-ci aurait pu engager pour certifier ses formations. Vous l’aurez donc deviné, le gérant de cette entreprise était très loin d’être #éthiqueetresponsable.

Aussi, quand j’ai fait progressivement face à toutes ces déconvenues, et que mon inscription en thèse a été confirmée, j’ai pris mes jambes à mon cou pour aller découvrir si l’herbe était plus verte (ou pas) du côté des vacations à l’université.

Ceci étant dit, cette première expérience m’a permis de faire plusieurs constats.

Le premier c’est que le monde de la formation pro s’apparente aux territoires du Far West. Un monde où la loi du plus fort règne, et où les inégalités entre formateurs, mais aussi entre centres de formation, demeurent fortes. Un monde où les entreprises payent parfois à prix d’or des formations de qualité relativement médiocre, données par des formateurs parfois peu formés.

La conséquence de ceci est la mise en place de nombreuses démarches administratives permettant de mesurer, d’attester et de certifier la qualité des formations. La certification Datadock, bientôt remplacée par Qualiopi en 2022, est une de ces démarches. Cependant, ces dernières sont longues, ardues, et parfois coûteuses. Mais elles permettent par ailleurs de faire financer les formations des salariés d’entreprises par des organismes que l’on appelle des opérateurs de compétences, ou des OPCO. Ces opérateurs sont des organismes agréés par l’État qui financent l’apprentissage, et accompagnent la formation pour les entreprises de moins de 50 salariés. Lorsque les entreprises ont plus de 50 salariés, celles-ci doivent financer elles-mêmes des formations permettant le développement des compétences de ces derniers. 

Je me suis récemment intéressée à ces démarches et à ce milieu, car devinez quoi, 7 ans après ma première expérience désastreuse, je retrouve le monde de la formation professionnelle grâce à une mission que je réalise pour un client. La différence entre cette mission et la première, c’est que mon client est #éthiqueetresponsable, et que cette fois-ci j’ai pris de la bouteille et évité de faire les mêmes erreurs.

Ce qui me permets de dire que le monde de la formation professionnelle peut être un formidable débouché pour les enseignants-chercheurs indépendants, du moment que ceux-ci soient correctement préparés et informés pour s’en saisir.

D’où l’écriture de ce présent post de blog.

Suite à mes différentes expériences, il me semble que les enseignants-chercheurs indépendants peuvent investir ce marché de la formation pro de trois manières :

  • En devenant formateurs ;
  • En conseillant les organismes de formation ;
  • En créant leur propre centre de formation.

Chacune de ces options présentent des avantages et des inconvénients comme nous allons le voir par la suite.

  1. L’enseignant-chercheur indépendant formateur

La première option est donc de devenir formateur. L’avantage des docteurs/des chercheurs est que ceux-ci disposent d’expertises spécifiques qui peuvent répondre à des demandes de formation précises. L’enseignant-chercheur indépendant peut alors viser un marché de niche et facturer ses formations à un prix plus élevé. Car comme le dit l’adage, ce qui est rare est cher.

Ceci étant dit, il existe plusieurs modalités pour développer son activité de formateur, soit :

  • en proposant directement aux entreprises de former leurs salariés ;
  • en étant formateur freelance mandaté par un centre de formation ;  
  • en étant soi-même formateur salarié d’un centre de formation.  

En tant que formateur indépendant, vous pouvez proposer directement vos formations à une entreprise suite à un démarchage traditionnel sans passer par un centre de formation, qui vous imposera sans doute une rémunération moins élevée. Cependant si vous n’êtes pas rattaché à un centre de formation, l’entreprise ne peut pas faire appel aux fameux OPCO définis plus haut. Alors que si en tant que formateur vous êtes rattaché à un centre de formation certifié Datadock (et bientôt Qualiopi), ces mêmes formations pourront être en partie financées. Ce qui est un argument commercial non négligeable pour une entreprise qui cherche à former ses employés.

Par ailleurs, le formateur salarié s’il dispose d’une certaine sécurité de l’emploi (et c’est un véritable avantage !) a moins de latitude pour négocier sa rémunération et pour avoir une activité de recherche sur le côté. Ce qui n’est pas le cas de l’enseignant chercheur-indépendant qui effectue des missions de freelance pour potentiellement plusieurs organismes de formation, et peut négocier des rémunérations plus avantageuses.

Car c’est peut dire qu’il existe des écarts extrêmes dans la rémunération des formateurs, freelance ou salariés. Lors de ma précédente expérience désastreuse, j’étais rémunérée 17€ de l’heure (et sans contrat de travail….). Cependant, depuis que j’ai fait ma propre étude de marché et interrogé quelques amis formateurs, je me suis rendu compte que certains facturaient entre 1000€ et 1500€ HT la journée de formation, soit grosso modo entre 150€ et 200€ HT de l’heure.

Pour ma part, ma règle personnelle est de ne jamais accepter un tarif horaire inférieur à celui des vacations universitaires, une fois toutes mes charges dues à l’URSSAF, soit grosso modo 60€ HT de l’heure pour un cours équivalent TD. Car sinon, autant faire des vacations à la fac où vous n’aurez pas à vous occuper de la paperasse administrative, ou du moins à minima.

Pour ceux qui se poseraient des questions sur la rémunération des formateurs, je vous conseille d’aller visiter ce site qui vous aidera à faire votre étude de marché en fonction de votre région géographique et votre niveau de diplôme.

Je terminerai néanmoins cette section en affirmant qu’il faut également faire attention aux organismes de formations prédateurs, car ils existent comme j’en ai fait la douloureuse expérience.

2. Conseiller les organismes de formation

C’est l’objet principal de ma mission pour l’un de mes clients, que j’accompagne dans le développement d’une formation à distance à l’aide d’une application web, et dans des domaines d’expertise qui me sont propres. Il existe en effet parfois des cas où une organisation fait de la formation sans que cela soit son activité principale, ou bien souhaite développer des formations pour diversifier son offre commerciale.  


Et c’est là où ça devient intéressant pour l’enseignant-chercheur indépendant. Car celui-ci dispose de compétences lui permettant de développer une formation de qualité, basée sur des connaissances scientifiques récentes, et sur une progression pédagogique pertinente. Ce qui n’est pas le cas des formateurs qui n’ont pas été formés à la recherche et à l’enseignement.

Ce sont ces compétences qui m’ont permis de réaliser cette mission pour mon client, que j’accompagne également pour obtenir la certification Qualiopi. Et obtenir cette certification n’est pas une mince affaire, et cela demande une certaine rigueur et des qualités rédactionnelles qui sont fortement développées lors du doctorat.

Même si ce genre de missions est encore rare, je pense qu’elles peuvent représenter des débouchés intéressants pour les enseignants-chercheurs indépendants que nous sommes.

3. Développer son propre centre de formation

C’est la troisième option, et sans doute la plus ambitieuse quoi que la plus lourde à porter.

Pourquoi créer son propre centre de formation me direz-vous ? Car c’est sans doute l’option la plus rémunératrice, et parce que cela permettrait sans doute d’embaucher des copains chercheurs sans le sou. Je n’ai pas encore tenté l’expérience, et n’en ai pas vraiment l’envie. Mais j’en ai tout de même un peu discuté autour de moi, et suis toujours preneuses de remarques et d’avis si vous en avez chers lecteurs et chères lectrices !

Pour vous donner un petit exemple : un de mes collègues indépendants facture 1000€ sa journée de formation en freelance à un organisme de formation. Ce qui paraît énorme me dirait vous.

Sauf que l’organisme en question ouvre la journée formation de mon collègue indépendant à près de 10 salariés d’entreprise, sachant que l’organisme de formation facture environ 900€ la journée de formation à chacun de ces salariés.

Bilan de la journée : mon collègue indépendant aura touché 1000 € HT de la journée, l’organisme de formation 10 x 900 € = 9 000 € HT

Certes, après l’organisme de formation a des charges que mon collègue indépendant n’a pas. Il doit payer mon collègue pour réaliser la formation, payer pour des locaux, entretenir le site web où sont annoncées les formations, faire du démarchage auprès des entreprises pour avoir un nombre suffisant de stagiaires pour être rentable, payer un professionnel pour l’aider à faire certifier ses formations etc…

Malgré tout, cela reste très rentable. Mais créer son propre centre de formation est une véritable entreprise qui demande une certaine connaissance du milieu de la formation pro, un goût pour le management, et qui éloigne l’enseignant chercheur indépendant du métier de formateur. Sauf peut-être si l’organisme de formation est développé à petite échelle sur un marché de niche propre aux expertises spécifiques des enseignants chercheurs indépendants. Je dois avouer cependant que je ne suis pas encore assez experte sur le sujet.  

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Aussi, amis enseignants-chercheurs, la formation pro est un marché à prendre et encore sous investi ! Aussi n’hésitez pas à regarder si cette voie peut vous convenir et à me faire des retours. 


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